La procédure de rétablissement personnel dans le cadre d’une procédure de surendettement
Si vous êtes en procédure de rétablissement personnel dans le cadre d’une procédure de surendettement, retenez que le respect des formalités de la déclaration de créances est crucial, notamment la mention des sûretés qui garantissent vos dettes. Une omission, même d’une sûreté, peut entraîner l’irrecevabilité totale de la créance, ce qui empêche tout recouvrement par le créancier. Cette rigueur vise à protéger la procédure et à garantir une transparence totale pour toutes les parties impliquées
Pour aller plus loin…
Qu’est-ce que la procédure de rétablissement personnel ? Deux procédures
Lorsqu’un débiteur est dans une situation irrémédiablement compromise, rendant manifestement impossible la mise en œuvre de mesures de traitement, la commission peut soit, avec l’accord du débiteur, saisir le juge de la protection et du contentieux pour l’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire si des biens susceptibles d’être vendus sont identifiés (articles L742-1 à L742-25 du code de la consommation), soit recommander un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire si le débiteur ne possède aucun actif valorisable (articles L741-1 à L741-9 du code de la consommation). Le juge de la protection et du contentieux a également la possibilité de prononcer un redressement personnel sans liquidation judiciaire directement, dans le cadre des recours dont il est saisi concernant les mesures imposées ou recommandées (articles L741-7 à L741-9 du code de la consommation)
Effets du rétablissement personnel avec liquidation judiciaire
La clôture pour insuffisance d’actif dans le cadre du rétablissement personnel avec liquidation judiciaire entraîne l’effacement de toutes les dettes professionnelles et non professionnelles, du débiteur, arrêtées à la date du jugement d’ouverture, à l’exception de celles dont le montant a été payé en lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé, personnes physiques (article L742-22 du code de la consommation).
À l’exception des dettes alimentaires, des amendes dans le cadre d’une condamnation pénale, des réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale, des dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale, et des dettes dont le prix a été payé en lieu et place par la caution ou le co-emprunteur, personnes physiques (articles L. 711-4 et suivant du code de la consommation).
Le rétablissement personnel entraîne également l’inscription au FICP pendant cinq ans (article art. L. 752-2 du code de la consommation).
Cette procédure revêt un caractère judiciaire rigoureux et implique le respect de formalités strictes par les créanciers, notamment lors de la déclaration de créances et des sûretés y afférentes. Cet article explore les implications de l’omission d’une sûreté à la lumière d’un arrêt récent de la Cour de cassation rendu le 4 juillet 2024, qui rappelle l’importance des formalités entourant la déclaration de créances.
Contexte général : le rétablissement personnel avec liquidation judiciaire et la déclaration de créances
Lorsqu’un débiteur est placé sous une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire, les créanciers doivent déclarer leurs créances conformément aux articles R. 742-11 et suivants du Code de la consommation. Cette déclaration doit comprendre, entre autres, le montant de la créance ainsi que la nature des sûretés ou privilèges qui y sont associés.
L’arrêt du 4 juillet 2024 (Civ. 2ème, 4 juill. 2024, F-B, n° 22-16.021) apporte une précision importante sur la portée de ces exigences formelles, notamment en cas d’omission d’une sûreté dans la déclaration de créances. Cet arrêt souligne les conséquences sévères que peut entraîner une telle omission pour les créanciers, en particulier en termes de recevabilité de leur créance.
Les exigences légales relatives à la déclaration de créances
L’article R. 742-12 du Code de la consommation impose que la déclaration de créances indique non seulement le montant de la créance mais également la nature des sûretés ou privilèges éventuels dont elle est assortie. Il s’agit d’une exigence formelle qui doit être respectée scrupuleusement, sous peine d’irrecevabilité en vertu de l’article R. 761-1 du même code.
La question qui se posait dans l’affaire en cause était de savoir si l’omission d’une telle sûreté devait entraîner une sanction aussi lourde que l’irrecevabilité de la déclaration de créance, ou s’il était possible de ne sanctionner que l’oubli de la sûreté elle-même, sans affecter la validité de la créance en tant que telle. En d’autres termes, le créancier pouvait-il voir sa créance simplement réduite à une créance chirographaire (non garantie) tout en maintenant la validité de la déclaration ?
L’arrêt de la Cour de cassation du 4 juillet 2024 (Civ. 2ème, 4 juill. 2024, F-B, n° 22-16.021)
Dans cette affaire, une société créancière avait omis de déclarer une hypothèque garantissant sa créance dans le cadre d’un rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Cette omission avait conduit le juge des contentieux de la protection à déclarer la créance irrecevable, la décision ayant été confirmée en appel.
Le créancier a alors porté l’affaire devant la Cour de cassation, arguant que la sanction d’irrecevabilité était disproportionnée. Il plaidait que l’omission de la sûreté ne devait pas rendre la créance elle-même irrecevable, mais simplement la priver du bénéfice de la sûreté.
Cependant, la Cour de cassation a confirmé la décision des juges du fond, rejetant cette interprétation. L’arrêt rappelle que l’article R. 761-1 du Code de la consommation prévoit l’irrecevabilité de la déclaration de créances lorsque les formalités prévues par l’article R. 742-12 ne sont pas respectées. Ainsi, l’omission d’une sûreté dans la déclaration ne peut être réparée après coup et la déclaration entière est frappée d’irrecevabilité.
Implications pratiques pour les créanciers
Cette décision met en lumière les conséquences particulièrement sévères pour les créanciers qui ne respectent pas scrupuleusement les exigences légales relatives à la déclaration de créances. Il ne s’agit pas seulement d’une simple omission administrative : une telle négligence peut entraîner la perte totale du droit de recouvrer une créance.
Les créanciers doivent donc être extrêmement vigilants lorsqu’ils déclarent leurs créances dans le cadre d’une procédure de surendettement. Toute omission, même celle d’une sûreté, peut conduire à l’irrecevabilité de la créance, privant ainsi le créancier de toute possibilité de recouvrement, même à titre chirographaire. Il est donc recommandé de vérifier minutieusement toutes les mentions obligatoires de la déclaration, et notamment les sûretés qui garantissent la créance.
Une approche stricte mais justifiée
L’arrêt du 4 juillet 2024 reflète une approche stricte du formalisme exigé dans les procédures de surendettement. Cette sévérité peut sembler injuste aux yeux des créanciers qui commettent une simple erreur d’omission. Toutefois, la Cour de cassation se conforme à la lettre des textes en vigueur, qui ne laissent aucune place à une interprétation plus souple.
Le droit du surendettement, bien qu’il puisse entretenir certains parallèles avec le droit des entreprises en difficulté, possède des règles propres et des sanctions adaptées à son domaine spécifique. Ainsi, contrairement à certaines procédures en droit des entreprises où une omission peut parfois être corrigée, le droit du surendettement ne prévoit pas de telles souplesses, ce qui justifie la rigueur des sanctions.
Conclusion
L’arrêt du 4 juillet 2024 de la Cour de cassation apporte un rappel clair et nécessaire des exigences strictes entourant la déclaration de créances dans le cadre du droit du surendettement. Les créanciers doivent impérativement déclarer non seulement le montant de leur créance, mais aussi toutes les sûretés qui la garantissent, faute de quoi leur créance pourrait être déclarée irrecevable. Cette décision souligne l’importance du respect des formalités dans ce domaine sensible du droit, où les erreurs peuvent avoir des conséquences irréversibles.
En pratique, les créanciers doivent redoubler de vigilance et s’assurer que toutes les informations requises sont bien fournies dans les délais impartis. Cette rigueur permettra d’éviter des sanctions sévères qui, comme le montre cet arrêt, peuvent être fatales à leurs droits de recouvrement.
Lire la décision en intégralité : Civ. 2ème, 4 juill. 2024, F-B, n° 22-16.021