Les Devoirs et Responsabilités du Courtier en Crédit Immobilier : Tout Ce Que Vous Devez Savoir

Droit bancaire

Introduction

Le courtier en crédit immobilier, en tant que courtier en opérations de banque et en services de paiement (COBSP), joue un rôle central dans l’obtention d’un financement adapté à un projet d’achat immobilier. En tant qu’intermédiaire entre l’emprunteur et les établissements bancaires, il a des obligations strictes, encadrées par la loi. Comprendre ses devoirs et responsabilités permet aux emprunteurs de s’assurer d’un accompagnement de qualité et conforme à la réglementation. Ces obligations concernent notamment leur immatriculation, leur responsabilité civile professionnelle, leurs règles de bonne conduite, ainsi que leurs devoirs d’information et de transparence. Voici un détail des principales obligations :

1. Un Rôle d’Intermédiaire Réglementé : Immatriculation obligatoire

Les COBSP doivent être immatriculés sur le registre unique tenu par l’ORIAS (Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance). Cette immatriculation vise à faciliter l’identification et le recensement des personnes exerçant une activité réglementée d’intermédiation en opérations de banque et en services de paiement (C. mon. fin., art. L. 519-3-1 et L. 546-1).

Les COBSP doivent également informer l’ORIAS de toute modification des informations les concernant, telles que le changement de lieu d’exercice ou la cessation d’activité (C. mon. fin., art. R. 546-3, IV).

2. Souscription d’une assurance de responsabilité civile professionnelle

Les COBSP doivent souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle (RCP) pour couvrir les conséquences pécuniaires de leur responsabilité. Cette obligation s’applique sauf si leur responsabilité est déjà couverte par l’établissement pour lequel ils agissent  (C. mon. fin., art. L. 519-3-4 et R. 519-16).

Le niveau minimal de garantie est fixé à 500 000 € par sinistre et 800 000 € par année d’assurance pour un même intermédiaire (C. mon. fin., art. R. 519-16, I, al. 1)

3. Respect des règles de bonne conduite

Les COBSP sont soumis à des règles de bonne conduite visant à garantir une relation honnête, équitable et transparente avec leurs clients. Ces règles incluent notamment :

Devoir de loyauté : Les COBSP doivent fonder leurs propositions sur une analyse objective du marché et proposer des contrats adaptés aux besoins des clients (C. mon. fin., art. R. 519-28, al. 4, C. mon. fin., art. L. 519-1-1, mod. par Ord. no 2016-351, 25 mars 2016, art. 8, concernant le conseil en matière de contrats de crédit à vocation immobilière). Cette obligation est réduite lorsque l’intermédiaire n’apporte qu’une aide lors de travaux préparatoires à une opération bancaire ou de services de paiement (C. mon. fin., art. R. 519-28, al. 5). Le courtier doit répondre sincèrement aux demandes de renseignements de l’établissement de crédit ou de paiement pour évaluer les antécédents du client et le risque encouru (C. mon. fin., art. R. 519-31, I). Il ne doit pas fournir de fausses informations pouvant donner une image inexacte de la situation du client (C. mon. fin., art. R. 519-31, II).

Devoir d’information : Ils doivent fournir des informations claires, exactes et compréhensibles sur les contrats proposés, les frais, les rémunérations perçues, ainsi que les éventuels liens financiers avec des établissements de crédit (C. mon. fin., art. R. 519-30)

Devoir de transparence : Ils doivent expliquer les avantages et les risques des contrats proposés et leur adéquation à la situation financière du client (C. mon. fin., art. R. 519-28, al. 2). Toutefois, cette obligation est allégée lorsque l’intermédiaire ne fournit qu’une aide pour les travaux préparatoires à la réalisation d’une opération de banque ou d’un service de paiement et qu’il ne perçoit aucune rémunération d’un établissement de crédit, d’une société de financement, d’un établissement de paiement, d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement, d’un intermédiaire en financement participatif, d’une entreprise d’assurance dans le cadre de ses activités de prêts ou d’une société de gestion dans le cadre de son activité de gestion de FIA (C. mon. fin., art. R. 519-28, dernier al).

4. Obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT)

Les COBSP sont soumis à des obligations strictes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ces obligations incluent :

La connaissance de la clientèle (KYC) : identification des clients et des bénéficiaires effectifs des opérations (C. mon. fin., art. L. 561-2, Le nouveau cadre réglementaire a été instauré par l’ordonnance no 2020-115 transposant la 5e directive (UE) 2018/843 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, accompagnée de ses deux décrets d’application D. nos 2020-118 et 2020-119, 12 févr. 2020).

La surveillance des opérations complexes ou inhabituelles

La déclaration des soupçons à TRACFIN en cas d’opérations suspectes (L. 561-15 du code monétaire et financier)

5. Obligations spécifiques liées à l’activité de conseil

Les COBSP qui fournissent des services de conseil rémunérés en matière de crédit à vocation immobilière doivent respecter des obligations supplémentaires, notamment :

  • Fournir des recommandations personnalisées basées sur une analyse objective du marché (C. mon. fin., art. L. 519-4-1 mod. par Ord. no 2016-351, 25 mars 2016, art. 8). 
  • Agir de manière indépendante lorsqu’ils ne perçoivent aucune rémunération autre que celle versée par le client (C. mon. fin., art. L. 519-1-1, al. 4 et 5 nouv).

6. Étude de cas (CA Aix-en-Provence, 26 septembre 2024, n° 19/13821)

L’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 26 septembre 2024 offre une illustration concrète des obligations pesant sur les courtiers en crédit immobilier, en particulier leur devoir d’information et de conseil envers leurs clients et des difficultés que ces derniers peuvent rencontrer dans le cadre d’une action en responsabilité.

Contexte de l’affaire

M. et Mme I., investisseurs immobiliers, avaient contracté cinq prêts pour financer leurs acquisitions. Souhaitant profiter de la baisse des taux d’intérêt et optimiser leur rentabilité, ils avaient fait racheter ces crédits par la banque X, avec un taux global de 2,95 % et un allongement de la durée de remboursement pour certains prêts.

Estimant cette opération désavantageuse, ils ont assigné la banque X en dommages-intérêts, impliquant également la société Y, un courtier en crédit, pour manquement à ses obligations.

Les obligations du courtier en crédit immobilier

L’article R. 519-28 du Code monétaire et financier impose aux courtiers en crédit d’éclairer les emprunteurs sur les avantages et les risques de l’opération, d’effectuer une étude financière prospective et de proposer le contrat le mieux adapté à leur situation.

Or, dans cette affaire, la société Y n’a apporté aucun élément prouvant qu’elle avait rempli ces obligations envers les époux I. et leur société. La cour d’appel a donc retenu un manquement du courtier à son devoir d’information et de conseil.

Absence de preuve d’un préjudice

Toutefois, les demandeurs n’ont pas réussi à démontrer que l’opération litigieuse leur avait causé un préjudice concret. En conséquence, la cour d’appel a confirmé le jugement de première instance, les déboutant de leurs demandes.

Analyse

Cette décision illustre l’importance des obligations des courtiers en crédit immobilier, qui doivent aller au-delà d’un simple rôle d’intermédiaire en veillant aux intérêts de leurs clients. Elle souligne aussi que la reconnaissance d’un manquement ne suffit pas : un préjudice réel doit être prouvé pour obtenir réparation.

Conclusion

Le courtier en crédit immobilier a des obligations strictes visant à protéger l’emprunteur et à garantir un accompagnement de qualité. Son rôle ne se limite pas à trouver un taux intéressant : il doit informer, conseiller, mettre en concurrence et assurer la conformité de l’opération. En tant qu’emprunteur, bien connaître ses droits permet de s’assurer d’un service de courtage efficace et transparent.