Crédit à la Consommation : FIPEN, Preuve de Remise par la Banque et Déchéance des Intérêts – Vos Droits expliqués

Quand vous souscrivez un crédit à la consommation, la loi (issue notamment de la loi Lagarde) impose aux prêteurs de vous remettre une Fiche d’Information Précontractuelle Européenne Normalisée, plus communément appelée FIPEN. Mais pourquoi est-elle si importante ?

La FIPEN : un document essentiel

La FIPEN n’est pas un simple papier. C’est un document essentiel conçu pour vous:

  • Vous permettre de comparer différentes offres de crédit facilement.
  • Vous donner les informations nécessaires pour comprendre l’étendue de votre engagement.
  • Vous éclairer sur les principales obligations qui pèsent sur vous en tant qu’emprunteur.

En bref, elle doit vous permettre de décider en toute connaissance de cause si ce crédit est fait pour vous.

Parmi les informations capitales que la FIPEN doit contenir, il y a le TAEG (Taux Annuel Effectif Global). Attention, ce TAEG doit être unique et présenté à l’aide d’un exemple représentatif clair, incluant toutes les hypothèses de calcul. Une omission ou une présentation ambiguë du TAEG (comme une « fourchette de taux ») peut entraîner de lourdes sanctions pour la banque calcul (TI Abbeville, 31 juill. 2020, no 19-000355).

La bataille de la preuve : avez-vous réellement reçu la FIPEN ?

C’est là que le sujet devient délicat. La banque a l’obligation de vous remettre cette FIPEN. Mais encore faut-il qu’elle puisse le prouver.

Historiquement, de nombreuses offres de prêt contenaient une clause type par laquelle l’emprunteur reconnaissait avoir reçu la FIPEN. On pourrait penser que votre signature sur ce contrat suffit. Détrompez-vous !

La Cour de cassation (Cass. 1re civ., 7 juin 2023, no 22-15552 ; Cass. 1re civ., 5 juin 2019, n° 17-27066), alignée sur la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 18 déc. 2014, n° C-449/13, CA Consumer Finance), est très claire sur ce point : cette clause type n’est qu’un simple « indice ». Elle ne suffit pas à elle seule ! Le prêteur a l’obligation de corroborer cet indice par un ou plusieurs éléments complémentaires. C’est ce qui fait toute la nuance du droit de la preuve en la matière.

Ce qui n’est généralement PAS une preuve suffisante :

  • Un document émanant uniquement de la banque : Si le document censé prouver la remise vient seulement de la banque et ne comporte ni votre signature ni vos initiales, il ne peut pas servir de corroboration valable (Cass. 1re civ., 7 juin 2023, no 22-15552).
  • La simple liasse contractuelle : La banque ne peut se contenter de produire l’ensemble des documents du contrat, même s’ils incluent la FIPEN. Pourquoi ? Parce que rien ne garantit que cette liasse vous est parvenue dans son intégralité. La banque doit prouver l’envoi effectif de la liasse (CA Caen, 6 mars 2025, no 24/00917)
  • La preuve de consultation d’une page invitant à lire la FIPEN : Une banque ne peut pas prouver la remise en attestant que vous avez visualisé une page de l’offre qui vous invitait à « prendre connaissance » de la FIPEN. Inviter à prendre connaissance et remettre effectivement la fiche sont deux choses différentes et la preuve de l’une ne vaut pas pour l’autre (CA Rouen, 30 nov. 2023, no 22/03457).

Ce qui pourrait être considéré comme une preuve :

Les tribunaux sont stricts, mais certaines pistes existent pour que la banque puisse prouver la remise :

  • Votre signature ou vos initiales sur la FIPEN elle-même : Même si aucun texte légal n’impose explicitement que la FIPEN soit datée et signée par les emprunteurs, l’apposition de vos initiales ou toute autre mention manuscrite de votre part sur la fiche elle-même ou sous la clause litigieuse aurait pu utilement prouver la remise effective (CA Reims, 4 avr. 2023, n° 22/01056 et CA Bordeaux, 5 janv. 2023, n° 20/00910).
  • Un élément de preuve complémentaire ne provenant pas uniquement de la banque : La Cour de cassation a suggéré que cet indice devait être corroboré, mais reste ouverte sur la nature exacte des éléments (Cass. 1re civ., 7 juin 2023, no 22-15552). Un courrier en complément de preuve a déjà été admis (CA Colmar, 13 juin 2022, n° 21/01199).

Il est important de noter qu’il existe parfois des divergences d’interprétation entre les différentes juridictions du fond. Par exemple, une cour d’appel a pu considérer qu’un exemplaire de FIPEN non signé ni paraphé pouvait suffire à corroborer l’indice de la clause (CA Paris, 13 juin 2024, n° 22/19610). Cependant, cette position est jugée critiquable par le doctrine, car elle pourrait permettre aux prêteurs de contourner la rigueur exigée par la Cour de cassation et la CJUE. De nombreux juges du fond exigent au contraire la signature sur la FIPEN. La prudence reste donc de mise.

Les conséquences pour la banque : la déchéance du droit aux intérêts

Si la banque ne parvient pas à prouver qu’elle vous a bien remis la FIPEN conformément aux exigences légales, elle s’expose à une sanction majeure : la déchéance du droit aux intérêts articles L312-12 et L341-1 du code de la consommation).

En clair, cela signifie que vous n’aurez plus à rembourser les intérêts du crédit, mais seulement le capital emprunté. C’est une sanction sévère qui vise à protéger l’emprunteur et à garantir le respect des obligations précontractuelles du prêteur.

Mon conseil d’avocat pour vous, particuliers :

En cas de doute, consultez ! Si vous pensez que la banque n’a pas respecté ses obligations en matière de remise de la FIPEN, n’hésitez pas à solliciter un avocat en droit bancaire. L’analyse de votre dossier permettra de déterminer si une action est envisageable pour obtenir la déchéance du droit aux intérêts de la banque.

La protection du consommateur est au cœur de ces règles. En tant qu’emprunteur, vous avez des droits, et il est crucial de les connaître pour vous défendre efficacement face aux professionnels du crédit.

N’oubliez jamais que l’information est votre meilleure alliée !

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